jeudi 18 juin 2009

Pavillon Papa

On m'a parfois demandé si toutes les mers et les océans se ressemblaient ou si, par l'habitude, on pouvait les différencier. J'aime bien cette question. En fait, j'aime bien ce qu'elle m'évoque quand j'y réponds.


Ce n'est pas le calme mélancolique de la mer des Sargasses, où les furies de Bonne Espérance.


Mais lorsque l'on revient d'une longue traversé.

Lorsque pendant des mois, on a regardé le soleil se lever dans un voile de brume, immuable, par le pot-au-noir. Ou s'éteindre dans un cumulonimbus et y réveiller les éclairs, soirs après soirs, dans la Caraïbe. Lorsqu'on a traîné nos flancs ternis un peu partout, et que l'on revient vers le Vieux Continent. Alors on sent. Un jour avant Gibraltar, quand la brume se lève, quand la couleur de l'eau change et que l'air s'allège. On sait que l'on rentre Puis on est en Méditerranée et on jurerai en connaître chaque mouton, chaque ombre.


Quand on me pose cette question, je pense à cela. Au retour. Au pays. A cette odeur de sel plus forte. A l'air plus frais. J'adore. Il y a toujours une ébullition particulière quand on retrouve sa première mer.


Quand je suis rentré, en octobre dernier, je n'ai pas reconnu mon pays. Pendant plusieurs semaines et plusieurs mois, je voulais être encore loin. Repartir. Croulant de travail et de démotivation, je ne voyais rien qui m'attache à cet endroit. Peut-être que la transition avait été trop rapide? que je ne trouvais plus ce que j'attendais tant? Je ne sais pas.


Toujours est-il que, depuis la fin des cours, j'ai gagné du temps. Ca m'a permis de me consacrer à tout ce que j'aime faire lorsque je suis à terre: rencontrer des gens, passer du temps avec mes amis, me reconnecter avec le monde, aiguiser ma curiosité. Depuis que le soleil brille, que la mer est baignable et que les profs me lâchent la grappe: j'ai l'impression de revivre!

Mon binôme de révision s'est reformé à l'approche de l'examen. On se tape dessus, on révise et puis on va à la plage; on nous donnerait difficilement l'âge de raison. En tout cas, ça me renvoie trois ans en arrière. J'ai du temps pour parler avec les gens, au delà du boulot, de tout et de rien, d'arts et de spectacles. Je prépare mes voyages.


Tout ce qui m'a manqué pendant l'hiver, le voilà! Toujours pas de Second Capitaine à l'horizon, mais je ne m'ennuie pas pour autant: les bons marins savent où traîner dans les ports, et parfois un équipier fait un bout de route avec moi. Il aura fallu sept mois pour que j'accepte et apprécie d'être ici. Et pourtant l'escale touche à sa fin. Dans trois semaines, on fait les sacs, on remise l'excédent et on repart.


La peinture est à peine sèche mais bien sous peu, le Maru appareille.